Observation... Nostalgie

Waldemar venait de quitter Furentez, et il s'était rendu ensuite ici, au littoral des écueils. Un rivage désolé, sur lequel aucun navire ne peut accoster, donnant sur un océan tourmenté, menant à une île, la Terre des Morts. Les tempêtes rendaient le voyage pour les vivants impossible, ce qui rendait cette îlt inviolable. Seul souverain de ce territoire, le Gardien était pire que les Errants, qui torturaient les vivants dans l'espoir de grossir leur rang de damnés.

Waldemar se souviendrait toujours des nombreuses années qu'il avait passées à explorer cette île désolée mais magnifique, ne cherchant même pas à enfoncer les âme dans l'errance. Il se souviendrait aussi du temps qu'il avait passé là-bas avec le Créateur, ressentir en le voyant la terreur, puis une grande affection pour ce Dieu maudit. C'est lui qui mit fin à ses années de langueur, et qui lavait pris sous son aile à la Basilique. Avec un demi sourire, il se rappela aussi la haine qu'il avait ressenti envers Ryuuku, avant de se désintéresser de lui et de quitter la Capitale Déchue pour reprendre ses voyages aléatoires.

La nostalgie habitait Waldemar. C'était un sentiment qu'il n'éprouvait qu'une fois sur l'île ou ici, sur le littoral. Il y venait rarement d'ailleurs, mais c'était un lieu que personne ne visitait, car pour des yeux normaux et sans souvenirs liés à cet endroit, le littoral n'était qu'une étendue de roches tranchantes sans intérêt. Autant dire qu'il provoquait le cafard et donnait envie de le quitter immédiatement. Mais chez Waldemar, cet endroit était superbe, et il se plaisait ici, dans sa sérénité, le corps balayé par les embruns et le vent sauvage...

Il se demanda si Le Créateur comptait toujours détruire le continent pour en faire un autre, bien mieux. Si par un hasard insensé, Waldemar vivait encore après une nouvelle Genèse, il voulait un lieu à l'image de celui-ci, pour qu'en y venant, les mêmes souvenirs surgissent à nouveau en lui. Autrement, autant que le Créateur le détruise directement, comme ça il n'éprouverait plus le besoin de venir ici.

* le temps
s'écoulait. La douleur ne tarderait pas à venir en masse avec
les combats qui reprendraient bientôt *

La guerre était à son apogée.
Une nouvelle bataille pointait à l'horizon, et Lauris avait
décidé de se changer les idées. Il était
alors parti en direction du territoire déchu dans le but de
faire la découverte de ce pays et avec l'objectif secondaire de
s'écarter de la population un moment.

Il dériva alors, par delà
les terres neutres, sur le bord du terrain maudit. Il était
arrivé sur le littoral. Il ne mit guère de temps à
repérer une présence non loin de lui.

Il le vit.

Il ne se cachait pas, il ne le pouvait
pas vraiment d'ailleurs à cause de sa couleur de peau, très
claire.

Lauris n'était pas vraiment
inquiet, ni curieux. Mais il ressentait bien que ce personnage
n'était pas démuni de puissance magique. Surement
quelqu'un de puissant. Il était pensif.

L'ange ne savait que faire. Lui parler,
passer son chemin ? Il été intrigué et la
curiosité venait de prendre le dessus. Il resta là à
le regarder.

Lauris savait que si lui avait pu
sentir son pouvoir, il en était de même pour l'inconnu.
Autrement dis il devais être au courant de sa présence.

La mer était calme... comme morte... mais plus les terres. Un individu était là, à le regarder. Lui même ne le voyait pas. Il le ressentait. Son aura était présente, et assez élevée. Il tourna la tête vers lui, et rien qu'à son expression, il vit qu'il était Xunlai. Probablement quelqu'un d'important, dans la hiérarchie de ce monde. Il soupira légèrement, rajusta l'énorme faux noire aux reflets bleus dans son dos, et se tourna vers l"inconnu, de façon à se retrouver face à lui.

" Bonjour, jeune Xunlai... puis-je savoir ce qu'un homme de ton camp fabrique en terre Déchue ? Ton aura est élevée, mais ne servirait à rien contre un homme de la puissance du Créateur. Cela dit... rares sont les déchus qui fréquentent ce littoral. Il donne le cafard paraît-il... Cela dit, je n'irai pas rapporter aux Déchus ton intrusion... rapproche toi donc... je parle trop... présente toi donc. Peut être je te connais."

La voix de Waldemar avait un ton grave et lent, désinteressé et calme. Il fixait calmement le Xunlai, et ses paroles ne trahissaient aucune entoureloupe. Si lui même pouvait parcourir Azalya à sa guise, pourquoi irait-il dénoncer cet homme jeune aux Déchus ? Le Créateur ne manquerait pas de le faire arrêter et de l'envoyer sous la Basilique... comme toujours.

* Le pendentif de ce Xunlai m'intrigue... on dirait celui que portait ce jeune ange... Landris Azakiel... avant de se faire décimer par la troupe d'assassins d'élite du Créateur. Si je pense droit, cet homme est un de leurs descendants, et donc connaît l'emplacement des bêtes Sacrées, tout comme moi... *

Les yeux blancs lumineux de Waldemar se perdirent un instant dans le vague lorsqu'il pensa pour lui même, puis il revint à la réalité et attendit la réaction du Xunlai.

* C'est
intrigant. *

Lauris réfléchissait.
L'homme, car il semblait en être un, était calme.

L'ange se sentit intéressé.
Il prit une voix calme et posé, voix ni grave ni aigu qui
était la sienne.

Bien le bonjour à
toi aussi. Je dénote que tu as confiance en toi. Tu pose
beaucoup de questions sans vraiment y répondre avant. Tu est
plutôt flou. Tu parles de Xunlai et tu me dit des leurs, je ne
sait pourquoi et tu ne te mets pas dans le même camp que les
déchus. Je conclus que tu n'est ni l'un ni l'autre.
Je me nomme
Lauris et comme tu l'a dis je suis Xunlai. Cela importe peu pour toi
je suppose. En ce qui concerne mes motivations ... je n'en ai pas
vraiment.

L'ange estimait que c'était
maintenant à l'autre de s'exprimer.

Je te retourne
toute les questions.

Lauris garda la
même expression neutre qu'il avait depuis le début sur
son visage et attendit la réponse.

Waldemar nota soigneusement ce que lui dit Lauris, en ignorant purement les détails qui ne l'intéressaient pas. Ainsi donc, il avait vu juste, cet homme était bien un descendant de la lignée Azakiel. Lauris, un des plus jeunes hommes jamais admis au Sénat. Evidemment, sa renommée était incroyable, chez les Xunlai.

" Je me nomme Waldemar Hvelgelmir. Je ne suis ni Déchu... ni Xunlai, pour la bonne raison que leur univers de contrainte dans lequel ils vivent ne m'intéresse pas... alors je parcours Azalya au gré de mes envies... tu peux estimer avoir réussi un exploit, en me croisant ici... cela dit, puisque tu es au Sénat, tu as peut être entendu parler de moi... j'ai fait quelques interventions à Zélia pour soigner des malades ou des blessés graves... et j'ai sauvé quelques un de vos régiments, qui croulaient sous des attaques de monstres... et si je suis sur ce littoral, c'est parce qu'il m'inspire la sérénité...."

Waldemar se rapprocha de Lauris, et pris son pendentif entre ses doigts. Il eut un imperceptible froncement de sourcil, puis recula légèrement et jaugea l'ange du regard.

* Ce gamin est bien trop jeune pour endosser les fardeaux laissés par sa famille... l'Empathie et le Pendentif... à son âge, on devrait être en train d'étudier, de s'amuser, et non pas participer à la politique du Royaume... cela dit on ne commande pas au destin... encore moins à celui décidé par le Créateur.... *

" Oh, et sache que je te connais, Lauris.... Azakiel. J'ai connu presque toute ta famille, le dernier étant ton père, Landris. "

Nombreux sont
ceux qui connaissaient ma famille mais que je n'ai jamais rencontré
pas.

J'ai en revanche
entendu parler d'une personne nous ayant aidé au front. On dit
qu'elle ère on ne sait où.

Cette
description lui correspondait bien. Lauris tacha de ne pas montrer sa
surprise quand aux paroles et déductions de l'autre. Il était
un peu surpris, toujours curieux et en même temps décontracté
par l'attitude de son interlocuteur. Il avança, le dépassa
et s'assit sur le rivage.

C'était
à lui d'essayer de parler.

Alors, tu me
connait. En y réfléchissant ce n'est pas si étonnant
que ça .. on me connait beaucoup ou peu celons les endroit
mais on me connait.
Tu a évoqué
le Créateur et je pense cerné qui tu est toi aussi. La
réponse est pour moi évidente mais je te pose quand
même la question.

Est tu un proche
du Créateur ?

L'ange avait
besoin de savoir. Waldemar connaissait bien des choses sur son compte
alors que Lauris n'en avait que peu. Il tenait à savoir à
qui il avait le dos tourné.

Waldemar ne bougea pas lorsque Lauris le dépassa et s'assit derrière lui, face au rivage. L'ange avait déjà deviné pas mal de choses quant à la nature de Waldemar, et ce dernier s'était rendu compte que lui aussi avait une certaine renommée, malgré le fait qu'il faisait tout pour rester totalement inconnu.
Bah... de toute façon, il ne restait jamais assez longtemps pour que son visage, même s'il est... assez unique on va dire, reste imprimé dans les mémoires. Il venait, aidait, et repartait sans plus de raisons, n'attendant pas de remerciement, seulement qu'on le laisse en paix, et seul. Cela faisait longtemps qu'il faisait ça, et ça marchait plutôt bien, alors il ne voyait pas pourquoi il devait changer ses manières.
Peu après, la question de Lauris le surprit. Il n'en laissa rien paraître, mais apparemment, l'ange savait que Waldemar avait autrefois fréquenté le Créateur.

"Hum... si je disais oui, m'attaquerais-tu ? Ce serait signer ton arrêt de mort à l'encre rouge... mais je vais te répondre sincèrement. J'ai vécu auprès du créateur une période correspondant à environ une dizaine de fois ta propre vie. Je sais énormément de choses sur lui, et je l'ai beaucoup aidé dans sa conquête d'Azalya. Mais lorsqu'il a créé l'abomination qu'est son fils, Ryuuku, j'ai décidé que ma place n'était plus à ses côtés, alors je suis parti. Avec une sorte d'héritage de sa part... tu es satisfait de ma réponse ?"

Waldemar se retourna vers l'ange, avec un visage sans expression.